[Auranesis podcast] – L’Edu-K

Entretien à la découverte de la kinésiologie.
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[Auranesis podcast] – L’Edu-K

Dans cette interview, nous avons le plaisir d’accueillir Maud Andréa, kinésiologue et formatrice spécialisée dans l’éducation kinesthésique. Cette approche éducative novatrice met l’accent sur l’apprentissage par le mouvement, soulignant l’importance du corps dans le processus d’acquisition des connaissances. Maud nous expliquera comment cette méthode, initialement conçue pour aider les enfants en difficulté scolaire, s’est révélée bénéfique pour des apprenants de tous âges et dans diverses situations de vie.

Au fil de l’échange, nous explorerons les principes fondamentaux de l’éducation kinesthésique, son fondateur Paul Dennison, ainsi que les mouvements spécifiques qui peuvent faciliter l’apprentissage et améliorer le comportement. Maud partagera également des exemples concrets et des conseils pratiques pour intégrer ces techniques dans notre quotidien, démontrant ainsi que l’apprentissage est un processus continu qui ne s’arrête jamais, quel que soit l’âge.

 
 
 
Delphine de Courville


Peux-tu nous expliquer ce qu’est l’éducation kinesthésique ?



 
Maud Andréa

L’éducation kinesthésique, ou kinésie, est l’apprentissage par le mouvement. Cette discipline tire son origine latine de “ex ducere” qui signifie conduire, diriger, qui va donc être la capacité à pouvoir faire grandir, orienter nos enfants pour développer le potentiel de chacun et sortir le meilleur de nous. C’est une approche éducative qui met en avant le corps et le mouvement dans le processus éducatif, souvent négligé dans notre société connectée. Cette approche aide à développer le potentiel de chacun en intégrant le mouvement à toutes les étapes de l’apprentissage. Initialement conçue pour les enfants ayant des difficultés scolaires, elle s’applique désormais à tous et dans diverses situations de vie.

 
 
 
Delphine de Courville


Qui est à l’origine de cette discipline ?



Maud Andréa

Paul Dennison, un Américain de 82 ans, est l’inventeur de l’éducation kinesthésique. Ancien enseignant à Los Angeles, il s’est intéressé aux élèves en difficulté, notamment sur le plan de la lecture. Il a collaboré avec divers professionnels (docteurs, optométristes comportementaux, chiropracteurs, etc.) pour proposer une approche novatrice, soulignant l’interdépendance entre le développement physique – donc l’utilisation du corps, l’acquisition du langage, et plus globalement la réussite scolaire. C’est une discipline assez récente, car c’est dans les années 80 qu’il a créé des centres d’apprentissage dédiés aux enfants en difficulté. Le premier cours d’éducation kinesthésique apparaît en 1981, qu’on appelle plus communément l’Edu-K.

Au cours de ses travaux, il fit la rencontre de sa future femme, Gail-E Hargrove, une éducatrice par le mouvement, et ensemble ils ont développé l’Edu-K et de nombreux projets autour de l’apprentissage.

 
 
 
Delphine de Courville


Et aujourd’hui, à quoi sert l’éducation kinesthésique ou l’Edu-K ?



 
Maud Andréa


Elle repose sur l’idée que le savoir-faire précède le savoir-dire. L’apprentissage passe par le corps et le mouvement, ce qui facilite l’intégration des connaissances. Les méthodes actuelles d’apprentissage à l’école, souvent statiques, ne suffisent pas alors que l’on est censé être des êtres humains plutôt mobiles. Donc la vie est mouvement, et notre premier enseignant quand on était petit, c’était le mouvement. Et finalement on se rend compte que ce n’est que par le mouvement qu’on a développé nos compétences motrices, et plus tard nos compétences cognitives. Donc l’éducation kinesthésique remet le mouvement au cœur de nos préoccupations éducatives.



 
 
 
Delphine de Courville

Comment l’éducation kinesthésique s’organise-t-elle avec le mouvement et les différents types d’apprentissage ?



 
Maud Andréa


Il n’existe pas de mode d’emploi unique. Chacun doit s’approprier les mouvements qui lui conviennent, en fonction de ses besoins. Paul Dennison a mis en avant l’importance de la communication entre les trois cerveaux : reptilien, limbique et cortical. Les mouvements aident à restaurer une communication fluide entre ces cerveaux, essentielle pour l’apprentissage.

Nous allons pouvoir associer certains mouvements au cerveau reptilien, c’est celui qui nous fait réagir par ce qu’on appelle communément les réactions de lutte, fuite, inhibition face à la peur.  De même, il va avoir des mouvements plus propices pour notre cerveau limbique, qui est en lien avec nos émotions, quand on est submergé ou quand on est coupé de nos émotions, et donc aider à retrouver une circulation équilibrée entre nos différentes émotions. Et puis on a le cerveau cortical, qui donne accès à notre discernement, à notre raisonnement logique en rassemblant les fibres nerveuses entre les hémisphères droit et gauche de notre cerveau. Ici l’enjeu est d’appliquer des mouvements qui vont permettre de restaurer une communication fluide entre ces deux hémisphères et entre ces trois étages du cerveau.

L’intérêt de l’Edu-K est d’avoir cette unité corps-esprit. On distingue souvent la tête pour les apprentissages et l’intelligence versus le corps pour nos activités sportives et ludiques. Alors que l’un ne va pas sans l’autre, et ce sont les mouvements qui vont venir restaurer cette union entre le corps et l’esprit.



 
 
 
Delphine de Courville

Peux-tu nous décrire un mouvement simple à reproduire chez soi ?



Maud Andréa

Un mouvement utile que je recommande souvent est l’allongement du mollet. C’est un mouvement que Paul Dennison a utilisé dans la pratique des coureurs non seulement pour détendre cette zone du corps, mais aussi pour améliorer leurs apprentissages.

Pour ce faire :

  1. Prenez appui contre un mur avec vos deux mains bien à plat et vos bras statiques.
  2. Placez un pied devant l’autre, à peu près la longueur d’un pas et vos pieds doivent rester parallèles.
  3. Et effectuez un mouvement de pompe avec le pied arrière. À l’inspiration, votre talon du pied arrière va se décoller. Et à l’expiration, il va venir se reposer au sol. 

Souvent, quand on est sous stress et quand on est dans des réactions disproportionnées (réactions de lutte, fuite, inhibition), ce qui se passe au niveau corporel, c’est que le corps va percevoir du danger et des contraction musculaires vont se produire, entraînant un raccourcissement des muscles et des tendons. Donc d’un point de vue physique, ce mouvement de pompe du mollet aide à restaurer la longueur naturelle des muscles et tendons, et améliore les capacités comportementales et cognitives.

À force de proposer ce mouvement à des enfants, Paul Dennison s’est rendu compte que sur le plan comportemental et cognitif, ça aidait surtout les enfants introvertis dans leur capacité à participer et à avoir plus de facilité à aller vers les autres. Plus globalement, cette approche marche également pour les adultes en les aidant à mener à bien un projet jusqu’au bout. 



 
 
 
Delphine de Courville


Quel est l’intérêt d’associer la kinésiologie à ces mouvements ?



Maud Andréa

La kinésiologie utilise le test musculaire pour identifier l’origine émotionnelle du stress. Cela aide à comprendre où et quand le stress s’est enregistré, permettant de le libérer par des mouvements appropriés.



 
 
 
Delphine de Courville


Peux-tu nous donner un exemple de ce lien entre mouvement et stress ?

Maud Andréa


J’aime bien faire le comparatif, que ça soit pour un enfant ou pour un adulte, avec le pouvoir de participer. 

Dans mon cabinet, il n’est pas rare que des parents viennent me voir parce que leur enfant est introverti, a du mal à prendre sa place au sein de l’école, à avoir des copains, etc. De même, je rencontre des adultes qui, dans leur cadre professionnel, vont avoir du mal lorsqu’ils sont managers à prendre la parole en public ou arriver à prendre cette place et cette figure d’autorité. 

Le but commun de ces situations est d’aller chercher où ce stress a été enregistré. Ça peut être pendant l’enfance, dans le cadre familial, à l’école, etc., où un stress, une difficulté à pouvoir s’exprimer, à participer, à prendre sa place a pu être ressenti. 

Le cerveau n’ayant pas de temporalité ni de frontière, il se peut que ce stress soit resté figé en soi, et qu’à chaque contexte similaire où on est confronté à prendre sa place et s’exprimer, le corps se rappelle à ce stress et nous bloque de manière similaire dix, quinze, vingt ans plus tard. Donc le stress est toujours actif et les mouvements, en parallèle de la kinésiologie, vont aider à diffuser et libérer le stress enregistré.



 
 
 
Delphine de Courville


L’éducation kinesthésique s’adresse-t-elle uniquement aux enfants ?

Maud Andréa


Heureusement que non, ça voudrait dire qu’une fois adulte, nous n’apprenons plus rien. Elle s’adresse à tous : les tout-petits, les enfants, les adolescents, les adultes, les personnes âgées. Les apprentissages se poursuivent tout au long de la vie, et cette approche est bénéfique dans diverses situations, y compris les reconversions professionnelles, les relations parent-enfant, les problématiques de sommeil, etc.



 
 
 
Delphine de Courville


Comment les mouvements sont-ils adaptés pour des personnes avec une mobilité réduite et les jeunes enfants dont la mobilité n’est pas encore complètement en place ?

Maud Andréa


Il n’y a pas de contre-indications, l’éducation kinesthésique est très adaptable. Les mouvements peuvent être ajustés en fonction de l’amplitude, de la durée, de la vitesse et de la difficulté, rendant cette approche accessible à tous, quel que soit le niveau de mobilité. En effet, on ne va pas aborder de la même façon un mouvement pour un enfant en école maternelle entre 3 et 6 ans qui est dans la construction et dans la découverte de son corps, et donc qui n’a pas encore toute sa motricité. Et de la même manière, ce ne sera pas le même mouvement avec des personnes âgées qui ont une mobilité réduite. Et c’est cette adaptabilité que je trouve très intéressante en fonction de la capacité de la personne à un instant T au moment où on l’accompagne. En effet, certains mouvements peuvent se réaliser assis, d’autres debout, en binôme, etc.

Ce sont des mouvements qui peuvent être reproduits quelque soit le lieu : en cabinet, en salle de classe, en salle de sport, à la maison, en maison de retraite, etc. Le but est que la personne s’approprie le mouvement et soit en mesure de le faire à tout moment de la journée quand elle le désire, et à son rythme.

 
 
 
Delphine de Courville


Comment s’inscrit l’édu-kinésiologie dans le milieu scolaire ?



Maud Andréa


Je pense que nous sommes aux prémices de l’intégration de l’Edu-K à l’école. On commence à voir une prise de conscience face aux difficultés scolaires pouvant être rencontrées. Autant au niveau de la maternelle, il y a des temps consacrés aux sports et aux activités motrices, alors qu’il y en a beaucoup moins à l’arrivée au CP.  Malgré le rythme des programmes à suivre, il y a de plus en plus d’enseignants qui s’intéressent à toutes ces nouvelles approches. Ce qui demande nécessairement aux enseignants de devoir s’adapter, ce qui n’est pas simple. Il y a aujourd’hui tout un travail de compréhension des besoins du corps enseignant pour arriver à trouver un terrain d’entente et voir comment apporter ces outils novateurs au sein d’une structure (scolaire) qui a des contraintes.

Une des principales difficultés des enseignants que j’ai pu rencontrer est l’effectif, et donc l’incapacité de pouvoir faire du cas par cas et accompagner les enfants de manière individuelle. Pour autant, des solutions existent. En éducation kinesthésique, des mouvements peuvent être utilisés pour baisser l’agitation à l’arrivée en classe après la fin de la récréation, par exemple, et avoir l’esprit clair pour se préparer à travailler. Ces mouvements peuvent être faits de manière collective et certains ne nécessitent pas une forte amplitude, ce qui est intéressant au regard de la superficie de certaines salles de classe. L’idée est d’avoir une sorte de petit sac de Mary Poppins, c’est-à-dire d’avoir accès à une bibliothèque de mouvements que l’on va venir piocher en fonction du moment de la journée ou de l’activité.



 
 
 
Delphine de Courville


En-dehors de l’enseignement, pour quelles autres professions il y aurait-il un intérêt particulier à se former à la kinésiologie ? 



Maud Andréa


Tous les métiers d’accompagnement au sens large, autant les psychomoteurs, psychologues, coachs, que les métiers de la médecine douce, et les infirmières et soignants. Tous sont confrontés à l’émotionnel, au physique, la mobilité, etc. C’est pour ça qu’il y a toujours ce lien entre le corps et le cœur, la partie cognitive et la partie émotionnelle.



 
 
Delphine de Courville


Finalement, comment donner envie aux parents et aux enfants de consulter un kinésiologue ?



Maud Andréa


Une de mes recommandations est que pour accompagner des enfants, il faut pouvoir redevenir nous-mêmes des enfants et aider à associer le mouvement avec la joie, le jeu, le plaisir au sein de la séance. C’est vraiment mettre l’enfant au cœur de la séance.

Les parents arrivent en cabinet avec pour objectifs de ne plus être convoqués à l’école, que leur enfant arrive à faire ses devoirs tout, qu’il se fasse plus facilement des amis, etc. Quand je demande à l’enfant ce qu’il aimerait dans sa vie, son objectif à lui, bien souvent ce sont des attentes différentes : finir un puzzle de 50 pièces, lire un nouveau livre, faire du vélo sans les roulettes, etc. Et le fait de pouvoir connecter l’enfant à son objectif, il se sent pris en considération et n’est pas là juste pour traiter le “problème” pour lequel il vient. C’est là qu’on le place dans une dynamique plus joyeuse où il sera enclin à venir travailler sur les stress qui l’a amené à être dans cette situation-là, mais sans en avoir véritablement conscience, car on se concentrera sur ce qui l’anime lui.



 
 
Delphine de Courville

Par rapport à cette discipline, quels sont les projets que tu mènes en-dehors de ton cabinet ?

Maud Andréa


J’aimerai accompagner et présenter tous ces outils aux personnes travaillant dans des structures d’accompagnement, dont l’école fait partie. Je suis actuellement en réflexion avec une institutrice qui a fait sa formation de kinésiologie à Auranesis. Elle est dans l’enseignement depuis plus de 20 ans, et connaît donc bien les tenants et les aboutissants, ainsi que les problématiques au sein des écoles. L’objectif serait de créer un module accessible à tous les profils qui sont dans l’encadrement et dans l’enseignement pour partager et faire connaître ces outils de l’éducation kinesthésique. On espère pouvoir annoncer très rapidement la tenue de ces ateliers. 

Points clés à retenir de ce podcast

  • Les apprentissages scolaires et psychomoteurs sont plus performants et faciles grâce aux mouvements du corps
  • Ces mouvements s’adressent à tout type de public, quel que soit l’âge (de la petite enfance jusqu’aux personnes âgées) et l’étape de vie en cours
  • Ces mouvements interviennent sur l’équilibre du corps et de l’esprit pour apporter une réponse à différentes problématiques : le relationnel, l’adaptation sociale, etc. 



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